Le 07 juin de chaque année, tous les Etats membres de l’Union africaine commémorent la Journée africaine des Frontières.Instituée en 2010 par les Chefs d’Etat et de Gouvernement africains, dans le cadre de la mise en œuvre du Programme Frontière de l’Union africaine, cette journée se veut un tremplin pour magnifier les frontières africaines en tant que passerelles d’intégration.
En rappel, la frontière, définie comme la ligne de démarcation entre les Etats, consacre de ce fait, l’espace territorial pour l’exercice de la souveraineté nationale et du pouvoir d’Etat. Ainsi définie, la frontière fixe les limites géographiques d’un Etat et permet d’identifier la population qui y vit. Dans le cas des Etats africains dont les frontières sont héritées de la colonisation, cette identité territoriale ne s’accompagne pas toujours d’une unicité socioculturelle, de sorte que des populations qui jadis partageaient la même culture et le même espace vital, se retrouvent séparées par des frontières définies de façon arbitraire.
Ces frontières sont :
– arbitraires parce que motivées seulement par les intérêts géostratégiques des puissances colonisatrices d’alors ;
– arbitraires parce que définies sans les premiers concernés que sont les populations locales ;
– arbitraires car ayant contribué à la fragmentation d’unités socioculturelles existantes.
C’est au vu de ce constat que, dans le cadre de la mise en œuvre du Programme Frontière de l’Union africaine (PFUA), la Journée africaine des Frontières a été instituée par les Chefs d’Etat et de Gouvernement. L’institution de cette journée est d’autant plus noble en ce sens qu’elle a pour objectif de contribuer à éliminer les sources de tension aux frontières des Etats et à faire des zones frontalières des espaces de paix, de sécurité et d’intégration pour un développement économique, social et culturel harmonieux.
La commémoration de cette journée constitue donc une opportunité pour sensibiliser les populations frontalières sur la cohabitation pacifique et la coopération transfrontalière et ainsi œuvrer à l’ancrage d’une nouvelle perception des frontières qui doivent être perçues non pas comme « des barrières » mais « des passerelles pour l’intégration». Le Burkina Faso qui sacrifie à cette tradition depuis 2013, a choisi de commémorer l’édition 2024 de la Journée africaine des Frontières sous le thème : « 𝐋𝐚 𝐠𝐞𝐬𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐝𝐞𝐬 𝐟𝐫𝐨𝐧𝐭𝐢è𝐫𝐞𝐬 à 𝐥’é𝐩𝐫𝐞𝐮𝐯𝐞 𝐝𝐞𝐬 𝐞𝐧𝐣𝐞𝐮𝐱 𝐬é𝐜𝐮𝐫𝐢𝐭𝐚𝐢𝐫𝐞𝐬 𝐝𝐚𝐧𝐬 𝐥𝐞𝐬 𝐩𝐚𝐲𝐬 𝐝𝐞 𝐥’𝐀𝐥𝐥𝐢𝐚𝐧𝐜𝐞 𝐝𝐞𝐬 𝐄𝐭𝐚𝐭𝐬 𝐝𝐮 𝐒𝐚𝐡𝐞𝐥 : 𝐝é𝐟𝐢𝐬 𝐞𝐭 𝐩𝐞𝐫𝐬𝐩𝐞𝐜𝐭𝐢𝐯𝐞𝐬 ».
Le choix de ce thème a été motivé par le contexte sous-régional actuel marqué par les défis sécuritaires auxquels font face le Burkina, le Mali et le Niger, qui ont constitué l’Alliance des Etats du Sahel (AES) pour mieux lutter contre le terrorisme et amorcer un véritable développement socio-économique de leur espace communautaire.
En effet, depuis une décennie maintenant, nos trois (03) Etats sont confrontés à l’hydre terroriste qui, dans sa dimension transfrontalière, a fait de la zone des trois (03) frontières, son épicentre à partir duquel, elle s’est peu à peu propagée à la sous-région, endeuillant les populations de ces pays et annihilant le développement socio-économique dans les zones touchées. Ce développement du terrorisme a convaincu les plus hautes autorités de nos trois (03) pays à unir leurs forces pour lutter efficacement contre ce fléau au-delà des frontières de chacun des pays. Cela s’est avéré indispensable pour la préservation de leur souveraineté territoriale et le développement socio-économique de la région du Sahel.
Cette volonté politique s’est traduite par la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) regroupant les trois (03) Etats, avec pour objectif premier la restauration de la sécurité, afin de booster le développement socio-économique des populations de cet espace. Cette démarche porte déjà des fruits en matière de lutte contre le terrorisme et dans bien d’autres domaines et cela, au grand bonheur des populations des trois (03) pays.
L’AES constitue un bel exemple de coopération transfrontalière et d’intégration qui témoigne à souhait de la nécessité pour les Etats africains, au regard de leur histoire, d’unir leurs efforts pour faire face aux défis auxquels ils sont confrontés. La coopération transfrontalière s’applique aussi bien aux questions sécuritaires qu’aux questions de migration, de libre circulation des personnes et des biens et de développement.
Pour le Burkina Faso, de nombreux acquis ont été enregistrés dans le cadre de la coopération transfrontalière avec les pays voisins, tant au niveau sécuritaire que dans d’autres domaines de développement. Ce qui conforte le Gouvernement à faire de la coopération transfrontalière une priorité en matière de gestion des frontières.
Vive la Journée africaine des Frontières !
Vive l’Intégration africaine !
𝐄𝐦𝐢𝐥𝐞 𝐙𝐄𝐑𝐁𝐎
Magistrat, Chevalier de l’Ordre du Mérite Burkinabè
LA PLUME