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[TRIBUNE] Bien-être social: Les conseils de Dr Niaoné sur l’impact des liens affectifs sur la santé mentale 

Moumini Niaoné, médecin diplômé en santé comportementale aux Etats-Unis, en santé sexuelle et reproductive au Royaume-Uni , cette semaine, nous parle des relations humaines. Pour lui, si elles sont de qualité sont une véritable protection biologique pour vaincre ces genres de maladies et vivre assez longtemps. A la semaine prochaine pour d’autres sujets.

La nature et la qualité de nos relations humaines comptent parmi les facteurs les plus puissants de longévité. C’est l’un des résultats les plus surprenants  et pourtant solidement établis de la recherche en santé publique. Barthélémy a été peu à peu abandonné par les siens. Trop occupés, sa famille ne prend plus le temps de lui rendre visite ou de s’enquérir de son état. On considère que lui fournir ses médicaments et sa nourriture est suffisant. Petit à petit, il est exclu des mariages, des baptêmes, des deuils il n’est plus informé, il ne compte plus. Il ne participe à rien. Il vit en marge, invisible.

Or, les études montrent que les personnes âgées comme Barthélémy, privées de liens affectifs, ont un risque significativement plus élevé de tomber dans la dépression et de mourir prématurément. À situation médicale égale, celles qui sont entourées, écoutées, et intégrées vivent plus longtemps. Dans les mois qui suivent son isolement, les jours de Barthélémy se ressemblent, gris et tristes. Sa santé mentale se dégrade, la maladie s’aggrave, et finira par l’emporter. Je vous raconte cette histoire pour attirer votre attention sur un point essentiel : le secret de la longévité ne réside pas uniquement dans l’alimentation ou l’activité physique, mais aussi  et surtout dans la qualité des relations humaines.

Plus de 140 études scientifiques, portant sur un suivi de plus de 300 000 personnes à travers le monde sur plusieurs années, ont montré que les relations sociales de qualité augmentent de 50 % les chances de survie. Ce lien entre sociabilité et longévité est aujourd’hui considéré comme aussi déterminant que des facteurs classiques comme l’activité physique, l’alimentation ou le sevrage tabagique. Des pays comme le Japon, qui compte plus de 100 000 centenaires, ont fait l’objet de nombreuses recherches confirmant ces résultats. Au cœur de cette longévité remarquable se trouvent non seulement des habitudes alimentaires saines, mais aussi des liens sociaux solides et réguliers : la famille, les cercles d’amis, les rituels communautaires, le respect des anciens. En effet, avoir une ou plusieurs personnes avec qui l’on se sent émotionnellement connecté, avec qui l’on peut échanger, qui se soucient sincèrement de nous, est fondamental pour la santé mentale et physique.

Ces interactions activent dans le corps la sécrétion de l’ocytocine, une hormone qui renforce les sentiments de sécurité, de confiance et d’attachement, tout en réduisant la production de cortisol, l’hormone du stress chronique, connue pour favoriser l’hypertension, les maladies cardiaques et les troubles immunitaires. Or, le stress chronique est un ennemi redoutable. Il favorise les maladies cardiovasculaires (dont nous avons parlé la semaine dernière), les cancers, ainsi que les maladies neurodégénératives comme Alzheimer. Les relations humaines de qualité sont donc une véritable protection biologique.

Quel que soit votre âge, en plus d’une bonne alimentation moins de sucre, moins de sel, moins de gras, plus de céréales complètes, de légumes et de fruits cultivez la générosité. Une étude menée par des chercheurs des universités d’Alabama à Birmingham a montré que la générosité  qu’elle prenne la forme de soutien, de bénévolat ou de simples actes de bonté améliore l’estime de soi, réduit le stress, abaisse la pression artérielle, et renforce la santé physique et mentale.

“Des gestes simples comme aider un voisin, faire un compliment ou donner un peu de son temps ont des effets profonds sur le bien-être”, soulignent les auteurs. Ils ont mis en évidence un double bénéfice de la générosité : en aidant les autres, on renforce leur santé mais aussi la nôtre. En cultivant des liens sincères, nous prolongeons la vie, la leur, et la nôtre.

Soutenir financièrement un proche, l’aider à organiser une activité ou à acheter ses médicaments, c’est important. Mais il existe aussi d’autres formes de soutien, parfois moins visibles mais tout aussi essentielles : Le soutien émotionnel, c’est faire sentir à quelqu’un qu’on comprend sa douleur, ses peurs, et qu’on est présent, sans jugement. Cette forme de lien renforce le moral, améliore l’adhésion aux traitements et peut véritablement sauver des vies. Le soutien informationnel, c’est aider l’autre à comprendre ce qu’il traverse, l’orienter vers un médecin, un service, une source fiable.

Dans un monde complexe, aider à s’y retrouver est un acte de solidarité. Le soutien d’appartenance, enfin, est souvent négligé  et pourtant, c’est celui qui a tant manqué à Barthélémy. Faire sentir à quelqu’un qu’il est toujours membre du groupe, qu’il n’est pas oublié, malgré ses difficultés, est un geste profondément humain. Il protège la dignité, renforce la santé mentale, et restaure l’espoir. C’est pourquoi je voudrais vous inviter à rétablir un rituel simple, mais essentiel : les repas en famille. Plutôt que de manger seul au restaurant ou dans un fast-food, absorbé par la fatigue, les urgences du travail ou les pressions quotidiennes, faisons l’effort de recréer une culture du repas partagé à la maison.

À midi, cela peut être difficile  mais le soir, le week-end, faisons du repas familial un espace de reconnexion. Vous protégez ainsi votre santé mentale, celle de vos proches, et vous renforcez les liens d’appartenance. Ce sentiment d’être attendu, d’être ensemble, d’avoir sa place, contribue à la longévité, comme l’ont démontré des centaines d’études scientifiques. Et au passage, vous ferez aussi du bien à votre corps :En cuisinant à la maison, vous maîtrisez mieux ce que vous mangez moins de sel, moins de graisses saturées, plus de fibres, de fruits et de légumes. Vous faites des économies, vous partagez des émotions… et vous augmentez vos chances de vieillir en bonne santé.

Dr Moumini Niaoné

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