
Le Togo fait-il des avances à l’AES ? C’est la question qui agite les esprits de nombreux observateurs. La récente interview du ministre togolais des Affaires étrangères, le Pr Robert Dussey, accordée à Voxafrica, jette en effet un éclairage intéressant sur la position du pays. Celui-ci n’a pas hésité à déclarer sans détour : « Ce n’est pas impossible que le Togo rejoigne l’AES ».
Une déclaration qui suscite interrogations et spéculations, surtout au regard des relations géopolitiques complexes du pays. Mais pourquoi le Togo, un pays réputé pour ses plages bordées de palmiers et ses villages perchés sur des collines, s’intéresserait-il à l’Alliance des États sahéliens (AES) ? Il est clair que ce n’est pas l’esprit révolutionnaire de ces nations du Sahel qui motive le Togo. Cependant, ce qui semble sous-tendre cette volonté d’engagement avec l’AES, ce sont avant tout des considérations économiques et géostratégiques.
Le Pr Robert Dussey évoque d’ailleurs le fait que la majorité des Togolais seraient favorables à une telle adhésion. Cela témoigne d’un pragmatisme, dans un contexte où les choix politiques se font de plus en plus en fonction des intérêts économiques. À y réfléchir, il est facile de comprendre les motivations du Togo. En rejoignant l’AES, le pays pourrait profiter de l’accès direct à des marchés et des ressources au sein de cette organisation, tout en développant des liens commerciaux plus étroits avec des pays comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
Le port de Lomé, l’un des plus dynamiques de la région, pourrait également devenir un point stratégique clé pour ces pays enclavés, qui dépendent grandement des infrastructures portuaires pour leur commerce extérieur. L’intérêt économique semble donc évident : un pays n’a pas d’amis, mais des intérêts, comme le dit si bien l’adage. Mais au-delà de ces enjeux commerciaux, une autre question se pose : peut-on réellement rejoindre l’AES tout en restant membre de la CEDEAO ? Cette interrogation demeure en suspens. Si l’AES et la CEDEAO poursuivent des objectifs parfois divergents, notamment sur la question de l’intégration régionale et de la gestion des crises politiques, les deux organisations pourraient-elles coexister pacifiquement dans le même espace d’influence?
La diplomatie togolaise devra naviguer prudemment entre ces deux entités, en pesant les avantages et les risques de chaque choix. Bien que le Togo semble envisager un rapprochement avec l’AES, il doit d’abord mesurer toutes les implications de ce choix. Cette question est loin d’être tranchée, et le gouvernement togolais devra probablement engager des discussions approfondies avec ses partenaires de la CEDEAO et de l’AES avant de prendre une décision finale. Car en politique, plus que jamais, c’est la capacité à équilibrer les intérêts divergents qui détermine la réussite de toute stratégie.
La Rédaction