Société
A la Une

Fil importé au Burkina: Des tisseuses élèvent encore la voix 

Ce vendredi 16 mai à Ouagadougou, l’Union des tisseuses de la région du Centre (UTRC) est montée au créneau pour dénoncer la présence persistante du fil de tissage importé sur le marché burkinabè. Et ce, malgré l’interdiction formelle édictée par le gouvernement le 24 septembre 2024. Réunies en conférence de presse, les responsables de l’Union ont tiré la sonnette d’alarme sur ce qu’elles considèrent comme une menace pour leur santé, l’environnement et l’économie nationale.

Pascaline Zongo/Nabolé, présidente de l’Union des tisseuses de la région du Centre

« Cinq mois après l’entrée en vigueur de cette mesure historique, nous constatons avec regret que le fil importé continue de circuler librement », a déclaré Pascaline Zongo/Nabolé, présidente de l’UTRC. Pour elle, cette situation constitue un défi direct à l’autorité de l’État, mais aussi un frein au développement du secteur textile local. Le fil concerné, souvent composé de polyester, est pointé du doigt pour ses effets néfastes. « Il est non biodégradable, donc nuisible à notre environnement. Mais plus grave encore, plusieurs de nos membres affirment souffrir de problèmes respiratoires liés à sa manipulation », a-t-elle souligné, s’appuyant sur les témoignages recueillis par l’Union.Loin de se limiter à ce constat, l’UTRC dit avoir mené une enquête auprès des tisseuses pour comprendre les raisons de cette préférence pour le fil importé. Résultat : la brillance du fil synthétique et sa large palette de couleurs séduisent à la fois les tisseuses et les clients. « Le fil importé donne un éclat recherché aux pagnes, ce que les clientes apprécient beaucoup », a expliqué une tisseuse interrogée par l’Union.

Le Présidium lors de la conférence de presse

Un autre facteur décisif réside dans la disponibilité immédiate de ce fil en plusieurs coloris, contrairement au fil local fourni par la Filature du Sahel (FILSAH), souvent vendu brut. « Les tisseuses doivent teindre elles-mêmes le fil de FILSAH avant de l’utiliser. C’est une tâche longue et coûteuse. Beaucoup préfèrent éviter cette étape », a ajouté Mme Zongo/Nabolé. Selon elle, ce n’est donc pas une question de prix, mais de facilité et d’esthétique. Pourtant, les avantages du fil burkinabè sont bien réels. « Il est plus confortable, adapté à tous les climats, et surtout, il soutient l’économie locale et l’expertise nationale », a-t-elle rappelé. C’est pourquoi l’Union lance une vaste campagne de sensibilisation à Ouagadougou. Une caravane sillonnera la capitale pour informer les tisseuses sur les bienfaits du fil local et les encourager à se conformer à la mesure gouvernementale.

Exposition des pagnes tissés

« Nous allons à la rencontre des femmes tisseuses. Nous voulons qu’elles sachent que consommer local, c’est aussi protéger leur santé et soutenir l’industrie burkinabè », a insisté la présidente de l’UTRC.En parallèle, l’Union prévoit un plaidoyer auprès de FILSAH pour qu’elle diversifie ses fils en proposant une gamme plus étendue de couleurs. « Si les fils colorés étaient disponibles localement, beaucoup reviendraient au coton burkinabè », affirme-t-elle. Enfin, l’UTRC exhorte les autorités à appliquer rigoureusement la loi. « Nous demandons au gouvernement de renforcer les contrôles pour que cette mesure ne reste pas lettre morte », a conclu Pascaline Zongo/Nabolé.L’Union, qui œuvre pour la reconnaissance et l’amélioration des conditions de vie des femmes tisseuses, affirme sa volonté de défendre un artisanat responsable, durable et véritablement burkinabè.

Djamal Ouédraogo 

LA PLUME

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page